POUR UN ASSOUPLISSEMENT DES REGLES D’ACCORD DU PARTICIPE PASSE

POUR UN ASSOUPLISSEMENT DES REGLES D’ACCORD DU PARTICIPE PASSE
Les difficultés de l’accord du participe passé (en abrégé PP) sont notoires. Des enquêtes ont montré que les professeurs de français y consacrent environ 80 heures de théorie et d’exercices au cours d’une scolarité ordinaire. Ce ne serait qu’un moindre mal si le succès couronnait l’entreprise. On en est loin. Face aux manquements qui abondent dans les copies d’élèves et dans la bouche ou sous la plume des adultes, les praticiens appellent périodiquement de leurs vœux une remédiation.
Le CILF ‘Conseil international de la langue française’ et le groupe EROFA ‘Études pour une rationalisation de l’orthographe française’ soumettent à cet effet aux Autorités gouvernementales et aux Instances de la Francophonie trois propositions (la première ne change rien à la situation actuelle, les deux autres se contentent de tolérer des conduites de plus en plus répandues) *.
(1) Les PP employés sans auxiliaire et les PP conjugués avec l’auxiliaire être s’accordent avec le mot ou la suite de mots que l’on trouve à l’aide de la question « Qui ou qu’est-ce qui est (n’est pas) PP ? ».
(2) Les PP des verbes pronominaux pourront s’accorder avec le mot ou la suite de mots que l’on trouve à l’aide de la question « Qui ou qu’est-ce qui s’est (ne s’est pas) PP ? » augmentée des éventuels compléments du verbe.
(3) Les PP conjugués avec l’auxiliaire avoir pourront s’écrire dans tous les cas au masculin singulier.
Insistons. Il ne s’agit en aucune façon de révoquer la norme officielle, représentative d’un registre de langue soutenu, mais, comme l’usage la transgresse fréquemment, d’ouvrir aux utilisateurs un espace de liberté, qui a d’ailleurs sa logique (voir ci-dessous 2 et 3).
COMMENTAIRES LINGUISTIQUES
(1) Le premier point de la proposition 1 ne remet pas en cause le figement optionnel des PP à valeur de préposition, d’adverbe ou de phrase condensée : Passé la poterne… = « après ». Vous trouverez ci-joint les documents = « ci-contre ». Fini les vacances ! = « c’est fini » ou « adieu », etc. Le second point semblerait contredit par des exemples tels Il est tombé des hallebardes (question « qu’est-ce qui est tombé ? », réponse « des hallebardes ») ; or, le propre de la construction impersonnelle est justement de recentrer l’attention sur l’évènement qu’exprime le verbe, accordé avec le sujet grammatical il.
(2) La proposition 2, munissant d’un se la question heuristique, étend à l’ensemble des verbes pronominaux l’accord des PP à pronom morphologiquement ou sémantiquement indispensable (du type Marie s’est absentée ou du type Marie s’est aperçue d’un détail = « a pris conscience »). Beaucoup d’auteurs classiques en usaient déjà ainsi.
(3) La proposition 3 s’inscrit dans le droit fil de la perte d’autonomie des PP au sein de formes verbales dont la cohésion ne cesse d’augmenter depuis le Moyen Âge. Quand le poète de Cour Clément Marot préconisait en 1538 l’accord du PP avec le substantif « qui va devant », il légitimait indirectement l’absence d’accord avec le substantif postérieur et enclenchait un processus d’invariabilité généralisée.


Questionnaire :
1. Souhaitez-vous une réforme des règles d’accord du PP ? (Oui/Non)
2. En cas de réforme souhaitée, quelles seraient les mesures parmi les suivantes qui recueilleraient votre adhésion ?
(a) Le PP employé seul pourra toujours s’écrire au masculin singulier s’il prend la valeur :
(i) d’un adverbe : ci-annexé, ci-inclus, ci-joint… (Oui/Non)
(ii) d’une préposition : attendu, excepté, mis à part, non compris, y compris, vu… (Oui/Non)
(iii) d’une phrase synthétique : Fini les vacances ! Terminé, les factures impayées… (Oui/Non)
(b) Le PP des verbes conjugués avec l’auxiliaire avoir pourra toujours s’écrire au masculin singulier. (Oui/Non)
En cas de réponse négative, accepteriez-vous néanmoins que puisse toujours s’écrire au masculin singulier :
(i) le PP des verbes couter et valoir ? (Oui/Non)
(ii) le PP des verbes suivis d’un infinitif ? (Oui/Non)
(c) Le PP des verbes pronominaux pourra toujours s’accorder avec le ou les mots répondant à la question Qui ou qu’est-ce qui s’est PP ? (Oui/Non)
En cas de réponse négative à la question (c) et de réponse positive à la question (b), préfèreriez-vous que le PP des verbes pronominaux puisse toujours s’écrire au masculin singulier sur le modèle des verbes conjugués avec l’auxiliaire avoir ? (Oui/Non)